La vérification fiscale, est-ce aussi simple qu’on pense?
Par Chantal Cousineau, DESS – fisc., MBA, CPA auditrice, CA, Associée, BDO Canada S.E.N.C.R.L./s.r.l./LLP
et
Christiane Maurice, LL.B., LL.M. fisc. Médiatrice accréditée, Directrice principale, Services en fiscalité, BDO Canada S.E.N.C.R.L./s.r.l./LLP
Contexte
Pour ceux qui en doutaient, les vérifications fiscales se multiplient au Québec et au Canada. Les administrations fiscales sont plus présentes dans plusieurs secteurs, notamment l’immobilier. Elles utilisent de mieux en mieux les outils informatiques mis à leur disposition, croisent l’information des bases des données et, parfois, partagent l’information avec d’autres administrations.
Si les communications sont plus rapides, elles ne sont certainement pas toujours efficaces ni comprises. Dans ces conditions, bien comprendre les règles et les différentes étapes d’une vérification fiscale ainsi que les outils à la disposition des contribuables pour assurer (et faire respecter) leurs droits et obligations peut faire une énorme différence dans le temps et les montants investis dans le cours d’une vérification.
Outils
Les outils pour assister les contribuables et assurer le respect de leurs droits peuvent sembler similaires au fédéral et au Québec, mais ils n’ont pas, sur le plan pratique, la même portée.
Au Fédéral, les vérificateurs de l’Agence du revenu du Canada (« ARC ») sont tenus de respecter la Charte des droits des contribuables. En cas de non-respect de certains droits liés aux services offerts, un contribuable peut déposer une plainte auprès du bureau des plaintes de l’ARC et ultimement demander l’intervention de l’Ombudsman de l’ARC. En pratique, ce processus est peu utilisé, car les pouvoirs d’intervention sont limités aux aspects liés aux services seulement et non au fond d’un dossier. D’ailleurs, les intervenants du bureau des plaintes et de l’Ombudsman ne sont pas tous qualifiés pour comprendre les aspects parfois techniques des dossiers qui leur sont soumis.
Au Québec, un virage impressionnant a été effectué. Revenu Québec a commencé par publier le Com-366 – Vos droits et vos obligations à l’égard d’une vérification fiscale que les vérificateurs sont tenus de respecter. Il y est entre autres prévu que les projets de cotisation soient émis après une vérification. Ainsi, une vérification fiscale ne devrait pas commencer avec une demande de signature d’un avis de renonciation au bénéfice de la prescription!
Le 6 octobre 2016, Revenu Québec a dévoilé la nouvelle Charte des droits des contribuables et des mandataires. Les diverses dispositions de cette Charte reprennent plusieurs droits déjà établis en droit administratif, notamment en matière de justice fondamentale. Par exemple, un contribuable a le droit d’être représenté et de s’attendre à ce que Revenu Québec tienne compte des coûts administratifs liés au respect des lois fiscales dans le cadre de l’administration de celles-ci. Cela peut concrètement se traduire par une limite à la quantité d’information qui sera exigée d’un contribuable, selon les circonstances propres au dossier.
Un contribuable qui veut assurer le respect de la Charte peut demander l’intervention du Bureau de la protection des droits de la clientèle. Les membres de cette équipe de Revenu Québec sont des gens spécialisés en fiscalité. Ils ont les compétences et les pouvoirs de faire des recommandations non seulement quant à la qualité du service rendu par les vérificateurs, mais également et surtout quant au fond des dossiers. Il s’agit d’une différence majeure avec le régime fédéral qui fait toute la différence en pratique.
Au Québec, un contribuable, y compris une société, peut également demander l’intervention du Protecteur du citoyen du Québec lors de différends avec les administrations fiscales. Dans certains dossiers, son intervention a fait la différence entre une entreprise qui a survécu et une entreprise qui aurait dû fermer ses portes.
Notez également que les employés du gouvernement du Québec sont tenus de respecter leur Code de déontologie des dirigeants et des employés (compétence, honnêteté, impartialité et diligence) et la Loi sur l’Agence du revenu du Québec. Ainsi, un vérificateur qui se voit conférer de larges pouvoirs à titre de vérificateurs n’a pas le droit de les exercer de manière absolue.
Dans tous les cas, il est recommandé de commencer par communiquer avec le supérieur du vérificateur, sans hésiter de faire appel à plusieurs échelons de supervision si cela s’avère nécessaire.
Connaître ses droits en matière de relations avec les administrations fiscales peut faire une grande différence en ce qui concerne l’efficacité d’un processus de vérification fiscal. Une gestion éclairée du processus peut permettre de réduire de façon significative le temps et les sommes investies par le contribuable et son équipe de conseillers dans le cadre d’un processus de vérification fiscale.